Adrien Van Beveren interview sur son retour à l’enduro

Sincère, ouvert, profond et avec la faconde qu’on lui connaît, Adrien Van Beveren, trois fois vainqueur de l’Enduropale du Touquet, aujourd’hui davantage centré sur le Dakar et le rallye-raid, revient sur son Enduro du Touquet, de ses 6 ans, à ses victoires en 2014-2015-2016.
Un souvenir d’enfance, un objectif de compétiteur et une course qui doit perdurer dans le temps, malgré les enjeux climatiques et environnementaux.
À l’occasion des 50 ans de l’Enduropale, Jean-Luc Douchet a demandé à VBA, quel était son Enduro du Touquet ?
Adrien, que représente l’Enduro pour vous ?
C’est le début de ma carrière sportive, mais avant ça, c’est l’histoire de la passion de la moto. Je suis allé voir l’Enduro depuis tout petit, avec mon père, à moto, à 6 ans. C’est le convoi des motos. Avant d’arriver sur le Touquet, j’étais déjà impressionné, ça me faisait vibrer. J’en parlais toute la semaine à l’école… L’atmosphère, les stands, les pilotes, le départ, le bruit des motos. C’étaient des deux temps à l’époque. Rien que d’en parler, j’en ai des frissons dans le dos. Sans même penser à y participer. C’était l’adrénaline que cela me procurait.
Qu’on soit poireau ou top pilote, il y a une magie avec cette course…
Je pense que c’est l’histoire de cette course, ces retrouvailles, cette fête. Quand tu es passionné par la moto, tout terrain ou pas, il faut connaître et venir voir l’Enduro du Touquet.
Quel est le moment où l’adrénaline est à son comble ?
En tant que pilote, la sortie du parc fermé, le convoi et le départ. Le moment clé, c’est quand tu sors du convoi, de la rue et la plage s’ouvre. Ça s’élargit, donc tu as l’effet d’accélération, même si tu n’es pas encore en compétition. Après, juste avant le départ, il faut être très concentré et relâché pour garder le côté naturel, le peps, ce que tu as en toi en tant que pilote. L’envie d’être le premier au bout. Il ne faut pas que l’émotion, l’adrénaline, le stress, les caméras, les gens, les motos autour prennent le dessus sur l’envie d’être le premier.
Ces victoires, elles ont changé votre vie ?
Oui, car c’était l’aboutissement de tout un travail. Une patience, une résilience. Ma première victoire au Touquet est arrivée grâce à une grosse remise en question., grâce à une capacité à rebondir. J’ai vécu des échecs alors que j’avais les capacités de le gagner. La première victoire a donc eu un impact exceptionnel, développer mon capital confiance, ouvert d’autres horizons, avec le Dakar par exemple.
C’est grâce au Touquet. Cette course m’a permis d’exprimer tout mon potentiel et d’accéder à mon rêve de le gagner, déjà ! Aujourd’hui, je pense Dakar, mais, il y a 10 ans, mon rêve, c’était de gagner le Touquet. De 15 à 23 ans, mon rêve, c’était le Touquet.
Faisons un saut dans le passé : les dunes, le goulet… Certains disent, c’était mieux avant ! Et vous ?
En tant que spectateur, c’était fabuleux de voir les pilotes dans les dunes, sur cette piste qui se rétrécissait dans le goulet qui devenait hypertechnique dès le deuxième tour, qui se défonçait. J’ai eu l’occasion de rouler dans les dunes, avec le rallye-raid, en Argentine – évidemment avec un respect, un contrôle sur ce qu’on fait, ce sont des courses qui sont encadrées. Mais c’est vrai que c’est exceptionnel.
Maintenant l’euphorie est la même, les gens se déplacent de la même façon, les marques s’investissent de la même façon. Cela n’a pas changé, ça a évolué. Et il faut vivre avec son temps […] C’est déjà super d’avoir réussi à faire perdurer cette épreuve malgré les enjeux [environnementaux, NDLR] et à garder l’énergie, l’adrénaline, qu’elle procure aux gens.
Je ne défends pas mon intérêt personnel de faire de la moto. J’en ai les preuves, si on le fait de manière intelligente, éduquée, on peut faire en sorte que le sport mécanique perdure très longtempsAdrien Van Beveren
Comment voyez-vous cette course dans 10 ans, 20 ans ?
J’espère qu’on va réussir à la faire durer. Cette course a toute sa place. Je vais parler au-delà de l’enjeu financier qu’elle représente. À un moment, il faut parler humain et émotion… Rien que pour cela, elle a toute sa place. Sans parler de la Ville, des commerçants, des gens qui travaillent autour de l’événement. On ne peut pas enlever ça. Il faut surmonter d’autres challenges, d’être capables de s’adapter, il y a des études d’impact de la course sur l’environnement.
Moi, je suis un fou de nature, je vis dehors, j’adore être à l’extérieur. Je veux respecter la nature, parce que je veux qu’elle dure, pour la transmettre à mes enfants, voire petits-enfants si j’en ai, et, je suis convaincu que c’est compatible. Je ne défends pas mon intérêt personnel de faire de la moto. J’en ai les preuves, si on le fait de manière intelligente, éduquée, on peut faire en sorte que le sport mécanique perdure très longtemps.
La passion, la folie de rouler à cette vitesse, de s’engager, de prendre des risques. Pour me sentir vivant, j’ai besoin de m’exposer, de prendre des risques. Cet Enduro du Touquet c’est s’exposer à la folie, tout en gardant le contrôle et en vivant cette folieAdrien Van Beveren
Quand vous voyez les images des années 70 – 80, que cela vous inspire-t-il ?
La passion, la folie de rouler à cette vitesse, de s’engager, de prendre des risques. Pour me sentir vivant, j’ai besoin de m’exposer, de prendre des risques. Cet Enduro du Touquet c’est s’exposer à la folie, tout en gardant le contrôle et en vivant cette folie. C’est grisant. J’aurais aimé vivre cette époque et à la fois, je ne suis pas quelqu’un qui vit dans le passé et je suis super heureux de ce que je vis aujourd’hui.
Tim Potisek, on pense également beaucoup à lui pour ce 50e anniversaire. Il a été une légende de cette épreuve…
Ça a été une inspiration Timoteï. Juste avant, je vous parlais de folie, d’adrénaline. C’est quelqu’un qui vivait à 200%. Il vivait de ça, il avait besoin de ça et je me retrouve en lui. Avec les victoires et le Dakar, j’ai réalisé que j’avais besoin de ce côté-là, du risque, de l’adrénaline. Tim, c’était un grand cœur, il n’avait pas peur de grand-chose. Il avait développé un pilotage en plus qui faisait de lui le champion qu’il était. C’est vraiment dommage qu’il nous ait quittés si tôt. Je pense que j’aurais partagé des choses avec lui.
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